Alors que de nombreux studios de jeux vidéo persistent à concevoir des mondes ouverts regorgeant d’icônes à visiter sur leur carte et cherchant à maximiser l’accessibilité pour atteindre un public plus large, Capcom prend le risque d’une approche à contre-courant des normes actuelles avec l’une de ses licences de niche, Dragon’s Dogma, en offrant une suite qui réduit au minimum les indications fournies aux joueurs dans leur quête. Dragon’s Dogma 2 adopte des aspects d’un jeu de rôle classique tout en proposant une approche originale et novatrice du genre. Il propose une expérience axée sur les voyages à travers des terres dangereuses et imprévisibles. Cette nouvelle itération enrichit et améliore ce qui a été vu dans le premier jeu. Le producteur et l’équipe de développement se sont appliqués à élargir l’expérience en termes de mécanique, et ont également inclus une carte beaucoup plus vaste à parcourir. Souvent, on a l’impression de se trouver face à un remake du premier opus plutôt qu’à une suite à part entière. L’aventure nous met dans la peau de l’Élu, chargé de vaincre le redoutable Dragon, mais cette quête apparemment simple se révèle être bien plus complexe et immersive que prévu.
Le jeu présente un monde ouvert massif où chaque élément est constamment en mouvement, créant ainsi une atmosphère vivante et dangereuse. Les routines des personnages, ennemis et monstres sont à la fois complexes et dynamiques, ce qui rend les rencontres imprévisibles et uniques à chaque visite d’une région. Dragon’s Dogma 2 intègre également une dimension de survie dans son gameplay. Il suit un cycle de jeu familier aux RPG d’action, avec des quêtes à accomplir, des monstres à combattre et des compétences à développer. Cependant, il étire et déforme ce schéma traditionnel en introduisant des éléments de planification, de conséquences et d’improvisation.
Avant de se lancer dans une expédition, le joueur doit prendre des décisions stratégiques telles que l’achat d’équipement, le choix de la classe de personnage (vocation) et la sélection de l’itinéraire le plus sûr. Dans Dragon’s Dogma 2, on sait toujours quand on part en quête, mais on ne sait jamais quand on reviendra en raison de toutes les situations imprévisibles qui peuvent surgir. C’est là toute la magie du jeu. Le danger est omniprésent, les monstres se regroupent et s’organisent pour submerger les joueurs. Les harpies rusées et impitoyables peuvent attaquer en groupe et fondre sur vous alors que vous êtes au sommet d’une tour, les gobelins peuvent tendre des embuscades près de rivières mortelles, les trolls géants peuvent kidnapper votre soigneur au moment crucial, ou un redoutable griffon peut s’inviter à la fête en plein combat, créant une action chaotique et imprévisible, ce qui contraste avec d’autres jeux du même genre.
Dans Dragon’s Dogma 2, les combats sont une véritable réussite et prennent souvent une tournure épique, comme lorsque vous plantez votre lame dans un monstre gigantesque, vous accrochez à sa fourrure pour le frapper dans différentes parties du corps et finalement le faire tomber au sol. Pour mener à bien ces batailles, un système de vocations est à disposition, offrant aux joueurs différentes classes ou archétypes de personnages pour leur personnage principal ainsi que pour leurs pions, les compagnons de voyage. Chaque vocation propose des compétences et des capacités distinctes, ce qui nous offre un large éventail de choix pour façonner notre expérience de jeu.
Les distances à parcourir sont considérables et se font souvent à pied, parfois sur des trajets pouvant atteindre une demi-heure, voire une heure. Le jeu réduit au minimum les informations sur la carte, vous laissant ainsi le soin de trouver votre chemin jusqu’à votre destination. Vous ne pouvez pas simplement sprinter, galoper ou voyager rapidement sans discernement jusqu’au point indiqué sur la carte. Ce parcours est souvent semé d’embûches, avec de nombreux monstres à affronter en chemin, parfois même en trop grand nombre. Les combats engendrent souvent d’autres affrontements dans Dragon’s Dogma 2, avec une multitude d’ennemis de toutes sortes qui vous assaillent lors de l’exploration, pouvant même vous poursuivre sur de longues distances. De plus, les dommages subis en cours de route ne peuvent être guéris que de manière limitée. À mesure que vous passez du temps hors des villes ou villages, cela se fait au détriment de vos points de vie, une partie étant perdue entre chaque combat. En effet, chaque affrontement laisse des séquelles sur votre jauge de santé, réduisant son niveau maximum et vous obligeant à être plus prudent lors des prochains combats, car votre personnage et ses compagnons ne seront plus à leur plein potentiel. Cela vous incite ainsi à faire halte vers un point de repos pour reprendre des forces. À un moment donné, vous devrez obligatoirement dormir pour régénérer entièrement votre santé, que ce soit en utilisant un feu de camp ou en séjournant dans une auberge. Parlant des feux de camp, ils vous offrent la possibilité de cuisiner de la viande pour améliorer temporairement les statistiques de vos personnages.
Bien que Dragon’s Dogma 2 soit principalement axé sur une expérience solo, il intègre néanmoins une composante multijoueur, voire communautaire. Le jeu propose la notion de « pions », des compagnons contrôlés par l’IA qui accompagnent le joueur tout au long de ses aventures. En tant que personnage clé de l’histoire, l’insurgé a la capacité de recruter ces pions, qui lui sont dévoués et prêts à tout pour mener à bien sa quête. Ces pions peuvent être recrutés dans diverses villes ou lieux spécifiques en interagissant avec des pierres dédiées. On peut filtrer et affiner sa recherche pour sélectionner des pions créés par d’autres joueurs. Le jeu nous donne aussi la possibilité de créer notre propre pion, un unique qui sert de compagnon de route et qui peut être réinvoqué même lorsqu’il meurt. Un personnage personnalisable en apparence, auquel on peut choisir une classe et gérer ses compétences. Une fois créé, notre pion personnel peut être partagé avec d’autres joueurs en ligne et être utilisé comme compagnon dans leur propre partie. Il vous reviendra alors avec de nouvelles connaissances, des ressources et des récompenses si l’hôte a partagé certaines choses avec lui. Et vous pouvez vous de votre côté en faire autant ce qui donne un côté très « communautaire » à Dragon’s Dogma 2. J’ai particulièrement apprécié cet aspect. À noter qu’en parcourant le monde et en combattant des créatures, on peut souvent voir des guerriers errants se mettre à participer au combat. Ce sont bien souvent des pions d’autres joueurs qui errent dans le monde et que vous pouvez recruter si vous le désirez.
Malheureusement, si l’intelligence artificielle (IA) et les pions jouent un rôle crucial dans l’expérience de jeu notamment en aidant le joueur dans ses aventures en offrant des conseils, en combattant à ses côtés et en fournissant un soutien stratégique, il faut bien souligner une lacune majeure dans le comportement de l’IA, notamment en ce qui concerne le pathfinding. Le pathfinding désigne la capacité des personnages contrôlés par l’IA à naviguer efficacement dans l’environnement du jeu. Dans Dragon’s Dogma 2, le pathfinding des pions est très discutable et peut rapidement nuire à l’immersion et provoquer quelques frustrations. Leur comportement peut parfois devenir erratique et imprévisible, ils peuvent trébucher, se heurter à des obstacles et même se diriger dans des directions aléatoires. Il faut savoir que dans le monde de Dragon’s Dogma 2, l’eau représente un réel danger pour toutes les créatures vivantes. Il y a en effet ce que le jeu appelle « le kraken » qui vous aspire quand vous tombez dans l’eau. Si l’insurgé peut survivre d’une telle chute, ce n’est pas le cas d’un pion ! Vous n’avez alors d’autres choix que de revenir en ville ou trouver une pierre de recrutement pour faire revenir le pion qui aura été englouti par le kraken. Et vu que l’IA a tendance à faire n’importe quoi, il arrive très souvent qu’ils trébuchent d’eux-mêmes dans l’eau dans les zones escarpées et sans raison… Malgré ces défauts, les pions restent utiles dans les combats et peuvent contribuer à créer des moments épiques quand vous affrontez des monstres de grandes tailles comme de trolls, des griffons ou même des dragons.
Comme annoncé par Capcom quelque temps avant la sortie du jeu, la version console tourne en 30 fps non verrouillés. Ainsi, dans les espaces en pleine nature le jeu tourne bien souvent au-dessus de ces 30 images par seconde, mais en ville on est plus proche de la catastrophe avec de grosses chutes sous la barre des 30 fps qui se ressentent bien et qui donne lieu à une expérience visuelle saccadée. Graphiquement, Dragon’s Dogma 2 s’en sort plutôt bien, surtout aidé par une direction artistique qui fait mouche et avec une résolution de 2160p dynamique sur Xbox Séries X, mais un peu de peaufinage aurait pu rendre l’expérience meilleure sur consoles. D’ailleurs, quelques mises à jour vont venir régler ces petits désagréments.
Dragon’s Dogma 2 offre une expérience qui vous donne l’impression de vivre une véritable aventure en surface, mais au fond, elle laisse une légère déception. Le jeu n’approfondit pas suffisamment ses idées pour rendre cette aventure véritablement mémorable. Cela est dû en partie à la similitude de nombreux éléments de son game design, comme les grottes qui se ressemblent toutes et ne réservent pas de surprises à la hauteur de leur exploration. De même, l’ouverture des coffres ne débouche souvent que sur la récupération d’objets peu utiles pour l’aventure, ce qui diminue le plaisir de leur découverte. C’est vraiment regrettable. J’aurais souhaité que le jeu propose de véritables donjons à explorer, avec des boss impressionnants à affronter en guise de conclusion. Cet aspect du jeu m’a assez frustré, pour être honnête. Mais qu’on se le dise, par son approche et la façon dont il est construit, le monde ouvert de Dragon’s Dogma 2 est l’un des meilleurs à ce jour.
Malgré ses défauts, le jeu parvient à nous immerger dans son monde dynamique et incroyablement vivant, nous incitant à rester vigilants et à nous adapter aux dangers qui nous entourent. Le jeu a cette force de nous laisser explorer et forger notre propre chemin à travers son monde. Dragon’s Dogma 2 est à saluer pour son originalité et son inventivité. Je pense qu’une extension est prévue et que c’est à ce moment que l’aventure prendra véritablement tout son sens comme Arisen est venu donné un véritable sens au premier Dragon’s Dogma. Pour le moment, lorsque vous arrivez au bout de l’aventure (et que vous avez découvert la véritable fin), rien ne vous pousse vraiment à repartir sur un second run en nouvelle partie plus, notamment par exemple à cause d’un manque d’un level scaling des ennemis. Ce qui est vraiment dommage. On sent que Capcom tient un concept au potentiel « ÉNORME » mais ça ne va pas au bout des choses (même en ayant découvert la bonne fin du jeu).