Rise of the Ronin, le nouveau jeu de samouraïs développé par la Team Ninja, sortira le 22 mars en exclusivité sur PS5. Grâce à PlayStation, j’ai eu l’opportunité de tester le jeu plusieurs jours à l’avance, ce qui m’a permis de passer de nombreuses heures plongé dans le premier action-RPG en monde ouvert de ce studio. Je suis donc en mesure de vous livrer mes impressions avant même sa sortie officielle sur PS5. Il est important de rappeler que la Team Ninja est bien connue des joueurs pour avoir créé des licences telles que Dead or Alive, Ninja Gaiden ou encore Nioh, ainsi que plus récemment Wo Long Fallen Dynasty. Avec un tel palmarès, que pourrait-il mal se passer ? Et pourtant, Rise of the Ronin pourrait bien être l’exception. Je vous expliquerai cela dans ce test qui garantit de ne pas révéler de spoilers !
Malgré toute la passion investie par le studio de développement dans cette nouvelle licence, on constate rapidement qu’elle ne répond pas aux normes actuelles, que ce soit en termes de graphisme ou de technique. Si le jeu se présente comme une exclusivité PS5, il faut le dire, on a déjà vu meilleur dans le même genre et même sur PS4. Cependant, le jeu bénéficie d’une très belle direction artistique qui lui confère une identité unique, particulièrement perceptible lors de l’exploration des lieux de son monde ouvert. Il y a par exemple un cycle de jour / nuit ainsi qu’un système de météo dynamique. Vous pouvez par exemple observer l’arrivée progressive de la pluie et de l’orage, ce qui change radicalement l’ambiance environnante quand vous explorez. Les bannières flottant sur les bâtiments des différentes villes s’agitent sous le vent, tandis que les arbres et l’herbe se plient dans toutes les directions. On voit les habitants sortir leur parapluie et certains courent en cherchant un abri, les mains sur la tête. Les développeurs ont apporté un souci du détail à l’environnement, et cela se reflète clairement à l’écran, des artifices qui profitent à masquer en grande partie la misère. Et je dois dire que grâce à ces petits détails qui s’accumulent, on finit par oublier que les choses ne sont pas bien jolies, et on se laisse immerger dans cette période sombre du japon, le « Bakumatsu », période qui marque la fin de l’edo, avec l’arrivée de bateaux noirs et d’occidentaux qui cherchent à ouvrir le pays au reste du monde. Malheureusement, malgré tous les efforts on est vite rattrapé par la réalité notamment quand il s’agit de regarder des expressions faciales grossières et des scènes qui ont bien du mal à maintenir un framerate correct.
Les premières heures de jeu ne rendent d’ailleurs pas justice à Rise of the Ronin. Les premières missions rappellent fortement Nioh, l’une des précédentes œuvres de la Team Ninja (très réussie au passage), mais avec un level design en net recul et une mise en scène pour le moins décousue. Cependant, cette impression s’efface peu à peu après quelques heures où l’on peut constater le travail réalisé par les équipes pour donner du sens à un scénario qui nous donne envie de poursuivre l’aventure et voir ou tout cela va nous mener. Le début de l’aventure met en avant la dualité des deux personnages principaux, les « lames jumelles » (des assassins), vous pouvez choisir de jouer l’un ou l’autre et modifier leur apparence dans un éditeur de personnages. Les premières missions, axées sur l’infiltration, nous transportent sur un navire où il faut dérober des documents secrets et tenter d’assassiner un personnage historique, avec les premiers didacticiels qui donnent un aperçu des mécaniques de furtivité et de combat du jeu. Parlons-en de la furtivité, car si en soi il est amusant de se glisser dans le dos des ennemis pour les assassiner dans les règles, l’IA de ces ennemis est quand même bien débile. Ils ne voient rien à trois mètres devant eux, n’entendent pas quand vous brisez trois tonneaux en bois derrière eux quand vous arrivez tel un ninja par une roulade, mais vous détectent si vous avez fait deux pas en position debout. Les ennemis semblent répondre à un script précis… Toutefois, malgré la débilité affligeante de l’IA, il peut être amusant de jouer en mode furtif dans certains cas, notamment quand vous arrivez en planant depuis un toit et que vous fendez sur votre ennemi depuis les airs pour l’assassiner avec style.
À cause d’un début d’aventure maladroit, on peut se demander à quel type de jeu on a affaire, mais au fil de l’aventure, notamment à l’arrivée du monde ouvert, le gameplay et l’histoire prennent enfin du sens. On peut explorer rapidement une ville en sautant de toit en toit avec un grappin et en déployant un planeur, traverser les vastes étendues à cheval, allez à la rencontre des localités et commencer à entretenir des liens avec de très nombreux personnages historiques. Personnellement, j’ai commencé à apprécier l’aventure après environ quatre heures de jeu. Si je m’étais arrêté après seulement la première heure, j’aurais probablement conclu hâtivement que Rise of the Ronin est un mauvais jeu. En réalité, l’aventure est plus que correcte, mais on n’est clairement pas dans le haut du panier surtout si on le compare à Ghost of Tsushima ou à Sekiro par exemple. Je cite les deux, car on ressent clairement leur influence sur les décisions de la Team Ninja pour la construction de Rise of the Ronin.
L’intrigue débute en 1853 et s’étend sur plusieurs années, nous entraînant jusqu’à la guerre civile qui a secoué le Japon en 1868-1869. c’est une période de changements pour le pays qui a du s’ouvrir à l’occident. Les Américains par exemple cherchent à apporter leur culture et leur façon de vivre aux japonais. Le shogunat est prêt à ouvrir le pays aux Occidentaux, ce qui ne plaît pas à des groupes anti-shogunat qui se forment un peu partout et cherchant à protéger leurs intérêts. En tant que joueur, on se retrouve au milieu du conflit parallèlement à notre objectif principal que je tiendrais secret et nous devons choisir quel camp nous soutiendrons dans nos actions, parfois avec des décisions lourdes de conséquences. Il y a un système de choix qui mènent à des conséquences dans Rise of the Ronin. Et le jeu vous le présente plutôt bien, pas seulement avec de multiples réponses lors de dialogues, mais en intégrant à l’histoire tout un casting de personnages pouvant être pro ou anti shogunat. Notez que tout est doublé en français (avec possibilité de changer les langues du jeu).
En fonction des liens que vous tissez avec ces personnages et vos décisions, l’histoire va s’y adapter, quitte à prendre des libertés sur les faits historiques réels sur lesquelles elle est basée (mais attention, cette fois contrairement à Nioh pas de yokaïs ou de surnaturel du folklore japonais). Le système est très intéressant et sert à la rejouabilité de l’aventure. Il y a par exemple une sorte de codex qui vous permet de revoir certains passages de l’histoire, suivre les conséquences de vos choix ou rejouer certains passages et même réécrite l’histoire en faisant des choix différents afin de remodeler les choses. L’aventure en ligne droite n’est pas très longue, vous pouvez largement finir le jeu en 20 heures et même moins si vous vous focalisez uniquement sur les missions principales. Heureusement, le jeu propose de très nombreuses activités dans son monde ouvert qui viennent rallonger fortement la durée de vie du jeu. Tout faire demanderait au bas mot 50 heures de jeu. Malheureusement, le monde ouvert est construit de la même façon que ceux d’Ubisoft avec une multitude d’activités sans grands intérêts et répétitives. Pour vous en donner quelques-unes, on parle de se rendre à un point donner sur la carte pour caresser un chat, pour photographier un lieu, ou pour nettoyer tout un camp rempli d’ennemis plus bêtes les uns des autres…
On sent que c’est la première fois que la Team Ninja tente le projet en monde ouvert et j’espère même que ce sera la dernière fois tant ils ne maitrisent pas cet aspect. Le monde ouvert n’est pas à voir comme un signe de modernité dans les jeux vidéo, bien au contraire, ça donne souvent lieu à des mondes plats et ennuyant à parcourir… Il n’y a rien de pire que d’ouvrir une carte et de voir des icônes apparaitre de partout, de constater que toutes les activités se ressemblent le tout au détriment d’une conception de niveau ou d’un game design cohérents. Ce qu’on gagne en liberté de mouvement, on le perd sur les missions plus fermées qui ont la même approche que Nioh par exemple mais avec un level design proche du néant ou l’on se contente de vous mettre quelques ennemis sur votre chemin, quelques bannières à dresser (qui servent de points de contrôle) avant d’aller croiser le fer avec le boss des lieux. À cause des efforts du studio à créer un monde ouvert, toutes les missions fermées qui étaient si bonnes dans les précédents jeux du studio se ressemblent et ne présentent rien d’original dans Rise of the Ronin…
À la vue de certains points que j’ai pointés du doigt, vous devez vous dire qu’il n’y a pas grand-chose à retenir de ce nouveau jeu de la Team Ninja. Pourtant, il y a bien un aspect ou le jeu brille. C’est dans son système de combat qui est fichtrement bien foutu avec des actions viscérales. Ça tranche sec, vos ennemis sont démembrés sous vos actions parfois avec une violence très impressionnante. Il existe différents types d’armes, y compris pour le combat à distance ou pour attaquer au corps à corps. Chacune de ces armes offre un panel de coups différents sans parler des différentes postures de combat que vous pouvez débloquer et équiper pour vous adapter à un ennemi. Système qui offre au joueur des forces/faiblesses et donne donc un côté stratégique aux affrontements. Les coups portés sont rythmés par d’impressionnantes actions à l’écran et d’effets sonores qui retranscrivent parfaitement toute la violence des coups. Tout est fait pour donner du plaisir au joueur et de lui faire ressentir l’intensité des combats. Pas de doute, la Team Ninja fait preuve d’une grande maitrise quand il s’agit de créer un système de combat.
Les affrontements misent sur le fait que vous allez tenter de dévier et parer les attaques de vos adversaires en tenant le bon timing. Et très franchement, ce système marche plutôt bien et donne lieu à de très beaux moments à vivre manette en mains. Par contre, encore une fois on est loin de l’exigence d’un Nioh ou plus récemment Wo Long. En difficulté normale, j’ai roulé sur la majorité du contenu en monde ouvert et sur les quêtes moins ouvertes. Cependant, lors de certaines missions principales, le jeu peut soudainement présenter quelques pics de difficulté bien sales qui pourront paraitre insurmontables pour certaines catégories de joueurs, exigeant des réflexes de ninja où la mémorisation précise des schémas de combat de vos adversaires devient primordiale. J’ai par exemple en tête une mission hivernale où vous devez affronter deux redoutables guerriers simultanément, combat qui m’a filé quelques sueurs froides. La moindre erreur lors de ce combat se traduisait par une punition assez sévère. La gestion limitée de votre Ki, fondant rapidement à chaque action, ne facilite pas les choses, notamment lorsque vous ne pouvez pas enchaîner plus de quelques coups sans vous retrouver essoufflé face à une contre-attaque imminente.
Vous êtes alors contraint de jouer défensivement, tentant de parer chaque assaut de vos adversaires, chaque attaque ayant son propre timing, ce qui peut conduire à une situation totalement incontrôlable. De plus, vos adversaires semblent disposer d’une réserve de Ki quasi inépuisable, chose qui peut paraitre non équitable. Heureusement, les développeurs ont eu la bonne idée d’introduire un mode de difficulté plus accessible, permettant de basculer vers une option « facile » si nécessaire. Ou au contraire, si votre but est de trouver une expérience de jeu plus ardue, il est possible d’opter pour un mode difficile. Notez qu’au cours de certaines missions, vous pouvez amener jusqu’à deux alliés PNJ avec vous, ceux avec lesquels vous avez tissé des liens qui vous aident à combattre. Vous pouvez même prendre leur contrôle à volonté. Le jeu intègre aussi un système de coop en ligne, ce qui permet de jouer avec d’autres joueurs réels plutôt que de se contenter de l’IA. Rise of the Ronin, offre évidemment des mécaniques hérités des actions-rpg permettant de gagner en puissance en augmentant le niveau de notre personnage, en trouvant de l’équipement de meilleure qualité, en débloquant de nouvelles postures de combat, en craftant même, mais hé, pour ça il faut encore arriver à accepter les mauvaises activités du monde ouvert qui plombent l’ensemble. On ne parle pas de traverser de chouettes niveaux à la Nioh mais d’un monde ouvert générique rempli d’icônes en tous genres sans la moins logique, et à ce niveau c’est la douche froide.
Les équipes de la Team Ninja ont récemment déclaré que Rise of the Ronin est le jeu le plus ambitieux du studio, avec un développement qui aurait même commencé avant celui du premier « Nioh », personnellement j’aurais tendance à leur répondre que c’est aussi leur oeuvre finalement la moins réussie de ces dernières années, même si le jeu reste correct. Je pense que les choses étaient bien plus maitrisées dans Nioh ou plus récemment Wo Long. Ici, on est sur un sous Nioh en monde ouvert qui fait très production « Ubisoft » dans l’âme. Difficile pour le coup de défendre l’indéfendable. Si vous n’êtes pas allergique à ce type de contenus dans les jeux vidéo, vous trouverez tout de même de belles qualités à Rise of the Ronin, notamment dans son système de combat, d’équipement et de gestion des personnages.